Comment les banques font grimper le tarif du virement instantané ?

Comment les banques font grimper le tarif du virement instantané ?
21 Déc. 2022

Virements instantanés entre toutes les banques au même prix que les virements SEPA classiques : c'est la perspective ouverte par les propositions législatives publiées par la Commission européenne en mois d’octobre. En effet, cette dernière a décidé de faire grève : 5 ans suite au lancement du nouveau moyen de paiement, considéré comme la pierre angulaire de la future souveraineté européenne des paiements, son utilisation reste secrète : en Europe seulement un virement sur dix d’après les données d'avril 2019, la France n'en comptait que 3%.

La principale raison du retard dans l'initiation n'a pas besoin d'être creusée : alors que les transferts traditionnels sont gratuits pour les amorcer sur le Web ou sur mobile, les transferts instantanés restent payants. En fait, la majorité des banques en France choisissent de faire supporter le coût de la mise en place de nouveaux moyens de paiement par les utilisateurs. Contre leurs intérêts : les transferts d'argent instantanés conduisent en fait à des innovations dans les paiements en ligne, les paiements de factures, les transactions personnelles, etc. Cette politique de prix freine la diffusion de l'innovation.

Il est indéniable que la plupart des utilisateurs peuvent désormais utiliser Paylib entre amis gratuitement, qui est un service de paiement interbancaire entre particuliers basé sur des virements instantanés. Mais il est loin de couvrir tous les cas d'utilisation possibles.
 

Transferts instantanés sans protection fiscale

Loin de baisser, le prix moyen des virements instantanés en France est en hausse. En comparant les prix de janvier 2022 aux prix de janvier 2023, selon une étude tarifaire, le prix unitaire des virements instantanés initiés sur le Web ou mobile augmentera en moyenne de 3,78% (de 0,79€ à 0,82€), supérieur à la protection tarifaire de 2 % promise par les banques de détail. Bien entendu, cette augmentation sera largement supportée par les clients du Crédit du Nord : leur prix de virement instantané passera de 0,50 € à 0,80 € au fur et à mesure de la fusion de leur banque avec la Société Générale. Toujours est-il que la tendance n'est toujours pas à la baisse.

Inversement, certaines banques ont découvert une astuce pour augmenter le coût des virements instantanés : la facturation par tranches de montant. Apparemment, le prix de transfert augmente en même temps que le montant du transfert.

L'Observatoire des tarifs bancaires du CCSF se penche plus précisément sur ce phénomène dans son rapport 2022. Il a constaté que ce modèle de tarification avait en fait le potentiel d'augmenter les factures.

D’après l'Observatoire, le coût moyen d'un virement instantané inférieur à 300 € est de 0,78 €. Les virements entre 300 € et 1 000 € ont connu une augmentation de 9 % (0,85 €). De plus, les coûts montent en flèche pour les établissements qui optent pour une tarification différenciée :

  • 1,18 euro pour un montant de 1 000 jusqu’à 1 500 euros
  • 2,86 euros pour un montant de 1 500 jusqu’à 5 000 euros ;
  • 2,89 euros pour un montant de 5 000 jusqu’à 15 000 euros ;
  • 7,95 euros pour un montant de 15 000 euros jusqu’à 100 000 euros.

À noter que ces écarts de prix ne sont pas justifiés par le coût d'utilisation du TIPS (Target Instant Payment Settlement), instrument de règlement créé par la Banque centrale européenne dont le prix est fixé à 0,002 € par opération pour tous les montants.

Les situations de transfert instantané ne sont pas une nouveauté. Les banques sont souvent très créatives lorsqu'il s'agit de faire supporter aux utilisateurs le coût de certains services. Aussi, pour limiter cette tendance, la Commission européenne a établi la régulation. Cependant, cela peut prendre un peu de temps. La cadence législative de la Communauté est telle qu'il vaut mieux attendre 2025 pour que les propositions législatives deviennent des réglementations asservissantes.